« L’atmosphère spirituelle de Bâle me semblait excellente et d’un cosmopolitisme enviable. Mais le poids de la tradition était trop lourd pour moi. Quand je vins à Zurich, je sentis très fortement la différence. Ce n’est pas l’esprit mais le commerce qui régit les relations de Zurich avec le monde. (…) J’éprouve encore pour Bâle un faible douloureux bien que je sache que ce n’est plus comme autrefois. » C’est ainsi que Carl Gustav Jung évoque dans « Ma vie », ses souvenirs de Bâle où il vécut et suivit ses études de médecine, avant de s’installer à Zurich. Ayant choisi cette lecture lors de mon séjour dans la cité rhénane, ces quelques lignes ne m’ont évidemment pas échappé.

Immersion

À 3 heures de Paris en TGV Lyria et à cheval sur trois frontières - France, Allemagne et Suisse -, la ville de Bâle mérite un week-end, sinon quelques jours. C’est au cœur de l’automne que j’ai pris le temps d’explorer le joyau de sa vieille ville, en séjournant dans un Swiss hôtel historique, l’hôtel Krafft, qui, par sa situation, m’a permis de profiter des rives du Rhin et du plaisir de la balade, des concerts et des buvettes, dans une ambiance très décontractée !

Même si la ville où vécut le célèbre psychiatre a bien changé, les grands esprits et la culture imprègnent encore fortement Bâle. Entre Érasme, Paracelse, Jacob Burckhardt, Thomas Platter et Hans Holbein le Jeune, vous aurez le choix, par exemple, de suivre un itinéraire (signalé par une couleur et un numéro différent) d’une de ces cinq personnalités bâloises, à l’angle de la Freie Strasse.

Si vous commencez par déambuler dans les ruelles du quartier historique, en voyant les façades des impressionnantes et cossues maisons à colombage, vous aurez l’impression de parcourir un musée à ciel ouvert. Certaines révèlent, au-dessus des portes d’entrée, des dates remontant même au XVIe siècle. Ne manquez pas de franchir l’entrée du musée des Cultures, pour y admirer son mur végétalisé. Puis vous allez forcément passer devant la belle façade rouge de l’Hôtel de Ville - le Rathaus Basel - avec la place du marché (Marktplatz), la cathédrale réformée - Basler Münster - avec son cloître et sa vue plongeante sur le fleuve, d’où domine l’impressionnante réalisation architecturale signée Herzog & de Meuron : la Tour Roche. Avec ses 178 mètres, elle est la plus haute tour de Suisse. Adjacente à la cathédrale :  la Münsterplatz.


La culture au cœur de la ville


Connue des amateurs d’art et des collectionneurs pour la grande foire d’art contemporain que constitue Art Basel - cofondée en 1970 par Ernst Beyeler, Trudi Bruckner et Balz Hilt, trois galeristes bâlois -, Bâle est aussi l’héritière d’une véritable tradition des arts plastiques et de l'architecture.

Le petit casse-tête qui se pose lors d’une première visite : comment choisir parmi ses 40 musées, dont certains plus insolites, comme l’un d’entre eux dédié au papier, ou bien encore un autre à l'univers des jouets ?


Le Kunstmuseum

J’ai privilégié le Kunstmuseum. Quel bonheur que de remonter le temps à travers les œuvres des grands maîtres de l’histoire de l’art, de Holbein à Picasso, en passant par Van Gogh, Monet, Klee et Warhol…
Ce dernier ayant été créé en 1661, sa collection d’art publique est la plus ancienne au monde. Elle comprend aujourd’hui plus de 300 000 œuvres – près de 4 000 peintures, sculptures, installations et vidéos, 300 000 dessins et gravures - issues de huit siècles de création !

L’ensemble a fait l’objet d’aménagements successifs et il se répartit désormais en trois bâtiments (Hauptbau (1936), Gegenwart (1980) et Neubau (2016). Prévoyez au moins une journée, en vous octroyant une pause gourmande dans le très plaisant Bistro patio. À noter qu'au programme de cette rentrée de septembre, a démarré depuis le 2 et jusqu’au 24 janvier 2024, une exposition consacrée à l’avant-garde parisienne des années 1904-1908, « Matisse, Derain et leurs amis ».


La Fondation Beyeler

L’autre musée qui a eu ma faveur est la Fondation Beyeler. Situé en dehors de Bâle, on y accède directement par le tram 6. Le bâtiment conçu par l’architecte italien Renzo Piano, est aménagé au milieu d’un immense parc arboré : c'est un lieu propice à la réflexion et à la lecture où l'on a envie de s'attarder.

Parmi les grands chocs des deux expositions temporaires présentées lors de mon passage, l’œuvre du géorgien Niko Pirosmani (1862–1918), qui est une figure légendaire, objet d’innombrables mythes, l’un des solitaires énigmatiques de l’art moderne et la « Collection fondation Beyeler remixed ». Cette constellations insolites propose des rencontres inspirantes et des perspectives éclairantes grâce à cette nouvelle présentation de la collection. Elle s’ouvre sur des paysages de Paul Cézanne, Claude Monet, Paul Gauguin et Ferdinand Hodler. Mais aussi des natures mortes de Pablo Picasso, Fernand Léger, Roy Lichtenstein et Wolfgang Tillmans.. Des œuvres de Francis Bacon et Marlene Dumas se côtoient, un dialogue s’engage entre des sculptures d’Alberto Giacometti et Louise Bourgeois, un face-à-face s’installe entre des tableaux monumentaux de Balthus et Neo Rauch. La naissance d’Ellsworth Kelly il y a cent ans est dûment célébrée en compagnie de Monet, Klee, Picasso, Pollock et Mitchell.

Le déjeuner ou le teatime au restaurant de la Villa Berower Park seront un délicieux point d’orgue à cette visite.

Activités ludiques

Si vous prévoyer un séjour lors des beaux jours, sachez que vous pourrez vous laisser porter par le courant du Rhin par une après-midi ensoleillé, expérience insolite garantir ! Quand pourra-t-on imaginer en faire autant dans la Seine ? Peut-être après les JO ? ... Depuis que le Rhin a été dépollué – preuve que rien n’est impossible – Bâlois et touristes, s’adonnent au plaisir de cette baignade urbaine, équipés du traditionnel « Wickelfisch ». Il n’y a rien à faire, sinon se laisser porter, après avoir empaqueté ses affaires et roulé 7 fois (!) la fermeture de son sac. Mon conseil : prévoir des chaussons d’eau, pour être plus à l’aise au moment d’entrer ou de sortir !

Enfin, une autre particularité de Bâle : ses plus de 200 fontaines, dans lesquelles l'été, il est tout à fait possible de barboter tranquillement dans l’une d’elles sur une place. La coutume est non seulement de s’y rafraîchir mais il est autorisé de s’y immerger. Exception faite, à mon avis, pour celle de Tinguely en raison de ses incroyables sculptures mobiles. Détour obligé par le musée consacré au mari de Niki de Saint-Phalle.

Pour ceux qui aiment faire la fête et prendre un dernier verre, les « spots » nocturnes ne manquent pas. Le roof top de l’hôtel Märthof étant réservé uniquement à sa clientèle, je vous recommande le bar du mythique hôtel des Trois Rois - où dit-on, Napoléon aurait séjourné –.

Quittant à regret Bâle, je me fais la promesse de revenir assurément pour son carnaval, inscrit au patrimoine mondial culturel immatériel de l’UNESCO, en février prochain, et de participer à son ouverture à 4 h du matin, le mercredi des Cendres, au son des flûtes… Sans faire mentir Jung, oui, il règne encore une atmosphère authentique et un art de vivre chaleureux à Bâle qui mérite bien son surnom de « capitale culturelle de la Suisse ».
 
Astuces et conseil pratiques pour préparer votre séjour

Pour votre transport depuis la France : en TGV Lyria : Bâle 3h10 depuis Paris, jusqu’à 6 allers-retours par jour.

Pour voyager dans toute la Suisse : Swiss Travel System (STS) a conçu un Swiss Travel Pass de 1ère classe qui donne un accès illimité aux trains, cars et bateaux et transports publics de 90 villes, et l’entrée libre dans plus de 500 musées en Suisse. Horaires et correspondances des transports publics suisses consultables via l’application Mobile CFF.

Offices du Tourisme suisse et de Bâle : myswitzerland.com - www.basel.com

Télécharger l’application gratuite « Basel City Guide » avec son guide audio en anglais ou allemand.

Avant de vous lancer dans le Rhin, un petit tuto pour utiliser dans les règles votre wickelfisch.

Réserver à l’hôtel Krafft. Ce Swiss historic hôtel qui célèbre ses 150 ans en 2023, a été construit en 1873. Dans l’esprit d’un boutique hôtel, il marie les codes du design dans son mobilier au sein d’un bâtiment historique. S’il offre un bon rapport qualité prix avec un emplacement privilégié et une vue imprenable sur la rive opposée du Rhin sur la cathédrale de Bâle, son restaurant en terrasse est appréciable. Le petit-déjeuner est servi dans une très jolie salle classique.

Le plus d’une réservation dans un hôtel de Bâle ? .a Basel Card remise lors de votre check-in pour bénéficier de réductions sur les billets d’entrée des musées et la gratuité des transports publics.

Si vous deviez rapporter une spécialité ? Un paquet de délicieux Leckerlis, petits pains d’épices bâlois. 

Fondation Beyeler - Bâle

©Visuels myswitzerland.com