Après Bâle (lire l’article précédent), j’ai poursuivi mon escapade helvétique à Zurich. En une heure de train depuis la cité bâloise qu’on peut qualifier de format de poche en comparaison, Zurich s’impose comme la plus grande ville de Suisse avec plus de 400 000 habitants, et plus d’un 1, 3 millions dans son agglomération, devant Genève et Bâle.

Un lieu de culture

Si l’activité bancaire domine encore, l’essor des secteurs du numérique et des biotechnologies, avec notamment l’implantation du géant du numérique, Google, a pris le pas en parallèle. La métropole helvétique reste toutefois une destination culturelle majeure en Europe.

Comme toujours dans mes voyages, je privilégie un fil rouge littéraire. Alors dès mon arrivée, direction la Spiegelgasse au n°1. Car la première référence qui s’impose est celle du mouvement Dada, surgi en février 1916 et qui a donné naissance au célèbre Cabaret Voltaire ! À l’époque ce « lieu de culture » avait voulu prendre le contrepied de tout académisme en réunissant une bande d’artistes zurichois dissidents autour de Hugo Ball et sa compagne, la chanteuse de cabaret Emma Hennings, Richard Huelsenbeck, Hans Arp, Sophie Tauber, les frères Janco, le poète Tristan Tzara, ... Dans un contexte où la grande guerre grondait et engloutissait des vies, ils voulaient tout renverser.

Que reste-t-il plus d’un siècle après ? La devanture est inchangée et l’âme du mythique cabaret a été fort heureusement préservé, grâce à l’engagement de passionnés, notamment de son directeur actuel, le « dadalogue » Adrian Notzn. Dans ce bar décontracté qui attire étudiants, jeunes idéalistes, lettrés ou touristes, certains pourront assister à des concerts, d’autres acheter des livres, autour d’une sélection « pointue » d’auteurs dadaïstes. À quelques mètres, au numéro 14, logea le jeune Vladimir Ilitch Lénine avec son épouse : une plaque rappelle son passage. Il séjourna ici durant une année, avant de retourner dans son pays et d’y mener la Révolution. Fréquentait-il aussi le Cabaret Voltaire ? La question reste ouverte.

 

La Grande Abbaye


Passage obligé - par l’église Grossmunster, autrement dit « grande abbaye », de style roman –. Si elle symbolise les saints martyrs Felix et Regula - la légende rapporte que Charlemagne en trouvant leurs tombes, aurait décidé de faire construire une église, parmi les trois principales églises de la ville -, elle représente l’un des principaux lieux de la Réforme.

Ne pas manquer le cloître adjacent, juste à gauche de l’entrée principale : une petite oasis prisée, surtout l’été, visiblement par certains habitués, qui aiment s’y installer pour lire !

Première journée

Ensuite, selon vos envies, plusieurs options sont possibles pour une première journée : traverser le pont ; en direction d’une autre église voisine, la Fraumunster. Son couvent accueillait des femmes de la noblesse européenne. Elle est réputée aussi pour son grand orgue - le 3e plus grand de Suisse - inauguré en octobre 1953 par le compositeur et organiste français Marcel Dupré, et surtout pour les vitraux réalisés par Chagall. Picasso n’avait-il pas dit un jour de lui : « Il a sûrement un ange quelques part dans la tête ». C’est à la demande du pasteur de l’église, alors qu’il a déjà 67 ans, qu’il va accepter le défi. Le résultat est unique : les cinq immenses vitraux flamboyants dans le chœur - intitulés respectivement le vitrail du prophète (Élie), de Jacob, du Christ, de Sion et des Lois - et la rosace ont été inaugurés en 1970, en présence de l’artiste lui-même, âge de 83 ans.

Deuxième journée

A proximité de l'église Grossmunster, vous pouvez poursuivre en direction du Kunsthaus : un étourdissement. Entre les collections anciennes et les expositions temporaires, tout amateur d’art, aura son content d’émotions. C’est le plus grand musée d’art de Suisse.

Il possède entre autres la collection plus importante d’œuvres de Munch hors de Norvège et des toiles d’artistes de renom comme Picasso, van Gogh et Chagall.

L’art moderne n’est pas en reste avec des œuvres de Warhol, Rothko ou Beuys. Tout comme le musée des Beaux-Arts de Bâle, le Kunsthaus a bénéficié d’une extension inaugurée en 2021, avec un bâtiment, signé par l’architecte David Chipperfield. Il est ainsi relié au bâtiment ancien (Moser) par un souterrain : un passage impressionnant à traverser !


Sur les chemins de la nuit


Comme point d’ancrage à mon séjour, j’avais choisi un hôtel voisin du Cabaret Voltaire, le Marktgasse, pour son emplacement et aussi parce qu’il a succédé à la plus ancienne auberge de Zurich ! Surnommée « Rothus », la maison rouge à cause de la couleur de sa façade, celle-ci daterait de 1291. Outre les cocktails signatures de son bar, l’adresse est réputée pour le chef étoilé Andreas Caminada qui a fait la réputation du restaurant « Igniv ». Attention, il faut s’y prendre plusieurs semaines, sinon mois à l’avance, pour espérer obtenir une table. Une décoration design domine dans tout l’aménagement intérieur. L’élégant lobby est au 1er étage. Les amoureux de lecture pourront s’isoler à loisir dans la bibliothèque.

La nuit, ça bouge ! En été, c’est la queue partout aux terrasses de la Niederdorfstrasse. Pour une ambiance plus underground, vous pourrez en vous dirigeant vers la gare, vous encanailler en prenant un verre du côté de la Langtrasse, l’ancien quartier chaud, devenu le rendez-vous des créateurs et des bars branchés. Et pour une ambiance folklorique alpine aux antipodes des spots branchés, juste à côté de l'hôtel, je vous recommande d'aller au Aelpli Bar, déguster la boisson typique, le Aelpli Milch.

Un peu de poésie ...

Avant de clore votre séjour, je vous recommande un tour de navigation sur le lac. Une curiosité à ne pas manquer qui permet de deviner de loin le palace 5 étoiles de Zurich, le Dolder tel un nid perché, aux allures de château de princesse. 

Il est temps de plier bagage et de poursuivre mon chemin… un livre à la main ! Pour le train du retour, j’ai continué la lecture de Ma vie, les mémoires de Carl Gustav Jung qui vécut à Zurich, mais je ne peux m’empêcher de terminer, en hommage au mouvement dada, avec ce poème de Tristan Tzara :

Pour faire un poème dadaïste
Prenez un journal
Prenez des oiseaux
Choisissez dans ce journal un article ayant la longueur que vous comptez donner à votre poème.
Découpez l'article.
Découpez ensuite avec soin chacun des mots qui forment cet article et mettez-les dans un sac.
Agitez doucement.
Sortez ensuite chaque coupure l'une après l'autre dans l'ordre où elles ont quitté le sac.
Copiez consciencieusement.
Le poème vous ressemblera.
Et vous voici un écrivain infiniment original et d'une sensibilité charmante, encore qu'incomprise du vulgaire.
Manifeste sur l'amour faible et l'amour amer - 1921
 
Astuces et conseil pratiques pour préparer votre séjour 

Pour votre transport depuis la France : en TGV Lyria : Bâle 3h10 depuis Paris, jusqu’à 6 allers-retours par jour. Puis une 1h depuis Bâle.

Pour voyager dans toute la Suisse : com. Swiss Travel System (STS) a conçu un Swiss Travel Pass de 1ère classe qui donne un accès illimité aux trains, cars et bateaux et transports publics de 90 villes, et l’entrée libre dans plus de 500 musées en Suisse. Horaires et correspondances des transports publics suisses consultables via l’application Mobile CFF.

Office du Tourisme suisse, onglet Zurich : myswitzerland.com

Télécharger l’application gratuite avec une carte interactive sur Zurich.

Réserver à l’hôtel Marktgasse. Cet établissement qui fait partie du réseau des hôtels suisses historiques.

Ayez le réflexe d’acheter la Zurich Card pour obtenir réductions et gratuités dans certains musées, pour une durée de 24h ou 72h. 

©Visuels myswitzerland.com