Destination gourmande iodée, la table étoilée de l’hôtel Castelbrac séduit les épicuriens. Les assiettes signées Julien Hennote expriment la créativité du jeune chef, qui sublime les produits du terroir local et de la pêche côtière. A déguster face à la mer, la cité corsaire de Saint-Malo en toile de fond.

Un début de parcours chez des étoilés
 

Ainsi baptisé en hommage au commandant Charcot, le Pourquoi Pas, restaurant gastronomique de l’hôtel Castelbrac (voir article rubrique hôtel) est une ode aux produits bretons. A la barre, Julien Hennote mène une carte de qualité, qui célèbre aussi bien les produits de la mer que ceux du terroir.

Originaire de Dinan, le jeune chef a fait ses classes dans les restaurants étoilés de plusieurs Relais&Châteaux : le Taha’a sur l’île éponyme polynésienne, le Mas Candille à Mougins, le Mas des Herbes Blanches à Joucas, le Royal Barrière à Deauville. « Ces expériences enrichissantes m’ont donné envie de revenir au pays en tant que chef », précise-t-il. La rencontre avec M. Bucaille, propriétaire du Castelbrac, neuf mois avant l’ouverture, lui a permis de participer à l’organisation de la cuisine.



Julien Hennote, Chef du restaurant le pourquoi pas - restaurant de hôtel Castelbrac.





Premier étoilé à Dinard
 

Inauguré en juin 2015, le Pourquoi Pas occupait l’actuel Salon Charcot. Mais au bout de deux ans, il est apparu plus judicieux de le transférer à l’étage inférieur, où il bénéficie d’une vue encore plus exceptionnelle.

« Quand on devient chef, il faut tout inventer. Mais j’ai eu la chance que M. Bucaille et Sophie Bannier, la directrice, me fassent confiance et me laissent carte blanche ». En 2019 Julien a été sacré premier étoilé Michelin à Dinard; un macaron confirmé en 2020 et 2021. « Certes, c’est une référence importante pour un cuisinier et un accomplissement pour toute la brigade. Pour moi, l’essentiel est de faire ce que j’aime, sans me mettre de barrière. Je dirai même que l’étoile m’a libéré », confie-t-il.

Privilégier les producteurs locaux
 

Julien, qui rêvait de se mettre aux fourneaux depuis l’enfance, aime associer mer et terre; par exemple en amuse-bouche le boeuf de la ferme bio de Raudais taillé au couteau relevé d'huîtres. Toutefois, il ne veut pas s’enfermer dans une case.

Chaque mois, il élabore une nouvelle carte après un échange avec son équipe. « Mais je dois généralement adapter ce que nous aimerions faire en fonction de ce que nos fournisseurs pourront nous offrir », explique-t-il. Un pêcheur pour les coquilles St-Jacques, un autre pour les crustacés, un troisième pour la pêche à la ligne en Bretagne nord.

Pour les fruits et légumes, il s’adresse à quatre petits producteurs locaux. Il travaille aussi avec Valentin Moricet, jeune diplômé d’horticulture, spécialisé dans les herbes et les fleurs, qui fut le premier à faire pousser du gingembre en Bretagne. « En plus des classiques fleurs d’ail, bégonias, dahlias, Valentin propose d’autres plantes comestibles aux saveurs surprenantes, telle la paederia lanuginosa, une feuille au goût de camembert affiné. Je n’étais pas attiré par les fleurs, car je pensais que ce n’était que de la déco. Chez Valentin, j’ai découvert des plantes qui attisent les papilles et permettent d’imaginer un futur plat au gré des récoltes », continue Julien.

Bœuf de la ferme bio de Raudais taillé au couteau relevé d'huîtres.


 
Comment naît un plat
 

Autre ingrédient inattendu : les baies des Chouans, jumelles du chinois poivre de Sichuan, élevées en petites quantités à Saint-Malo. « Je voulais introduire cette épice sur la carte. Je l’ai mise dans un bouillon de petits poireaux assez doux, dont nous disposions au même moment. Nous avons cherché le poisson le plus adapté, ainsi que le mode de cuisson adéquat. L’esthétique est importante pour finaliser un plat, mais je privilégie d’abord le goût ». Ainsi, est né le Saint-Pierre poché à la baie de Saint Malo, jeune poireau et coquillages.

Piochant dans ses souvenirs d’enfance, Julien a misé sur le lait ribot, tradition bretonne de lait fermenté pour faire pocher un cabillaud. « J’ai pu ainsi lui donner un peu d’acidité. Je l’ai agrémenté d’un sabayon au pain grillé, qui apporte un peu d’amertume et relève le plat. Puis j’ai ajouté du caviar pour le côté iodé, mais j’aurai pu le remplacer par une huître végétale. L’étonnante mertensia maritima, qui pousse dans la terre, laisse croire que vous croquez une huître de pleine mer », raconte-t-il.

Saint-Pierre poché à la baie de Saint Malo, jeune poireau et coquillages.



Un chef éthique engagé
 

Membre de l’association Ethic Océan, Julien ne servira jamais un poisson dont l’espèce se raréfie ou est en période de reproduction. Dans sa démarche d’approvisionnement durable en faveur de la préservation des ressources de la mer, il n’hésite pas à mettre au menu des espèces moins nobles, tels le tacaud, à la chair fine et délicate, ou le mulet. « J’ai expliqué mon choix à mes équipes, en cuisine comme en salle, et nous avons des retours positifs de la clientèle ».

Incontournables dans les brasseries, les moules entrent rarement dans les cuisines des étoilés. Au Pourquoi Pas, elles sont sublimées pour accompagner une émulsion d’eau de tomate montée en chantilly avec du blanc d’œuf. Complètement bluffant !

En quête perpétuelle de créativité, Julien conserve pourtant un plat signature. « J’inscris régulièrement sur la carte la raviole de homard bleu car elle est très plébiscitée. Mais pour éviter la monotonie, je m’amuse à en modifier la recette au fil des saisons ». Par exemple, cet automne, il l’accommodait de carottes au safran dans un jus réduit des têtes.

Raviole de homard bleu, carottes au safran dans un jus réduit des têtes.

Plaisir du palais et des yeux
                                             

Malgré l’indéniable influence de la mer, la viande n’en est pas moins oubliée. En vedette en ce mois de décembre, la canette marinée au vin de Noël.

En dessert, la cheffe pâtissière, Annabel Lévéque met en scène Prunes confites, tartelettes caramélisées croustillantes, glace au lait d'amandes ou panais croustillant, crème glacée au grué de cacao et chocolat fondant. Des douceurs savamment pensées lors de l’élaboration de la carte pour que l’équilibre des menus, mignardises comprises, soit parfait.

Nommés Lord Hamilton, Lyona Faber et Jean-Baptiste Charcot, clin d’oeil à l’histoire de la bâtisse, les trois menus se déclinent en quatre, six et huit services. A savourer dans un décor teinté d’une élégance Art Déco, où le chef a accordé une attention particulière aux arts de la table. Pour que ce voyage gustatif soit aussi un plaisir des yeux !
 

Pourquoi Pas
17 avenue George V
35800 Dinard
Tel. 02 99 80 30 00

castelbrac.com