Est-il vraiment utile de présenter cette Maison ? Kammerzell est un restaurant iconique en Alsace et une demeure historique du XVème siècle. Tous les visiteurs locaux ou étrangers passent devant sa façade Renaissance face à la Cathédrale de Strasbourg. Poussons la porte ensemble et entrons dans ce lieu qui incarne à lui seul la magie de l’Art de Vivre à la Française. Une dégustation signée Hélène Feltin.

    


Un monument exceptionnel

Aucune construction à pans de bois ne lui ressemble par sa richesse et les histoires qu’elle raconte. La légende la date de 1427 même si on lit 1467 sur un linteau en grès. Les trois étages eux remontent à 1589 et on y voit de nombreux motifs comme les quatre âges de la vie, les signes du zodiaque, des musiciens et bien sûr l’espérance, la charité et la foi. La maison est haute (vingt et un mètres) et elle suit la courbe de sa célèbre voisine la Cathédrale Notre Dame. Des fenêtres du premier étage, j’admire la rosace, les statues diverses telles que saints, vierges, martyrs, chevaliers, … Tour à tour, Kammerzell fut la maison d’un négociant, d’un drapier ou d’un orfèvre. Vendue aux enchères en 1879, elle est attribuée à l’Oeuvre Notre Dame qui a loue à plusieurs commerçants. En 1930, un groupement de viticulteurs la transforme en restaurant et lui donne le nom de Kammerzell. Classée à l’inventaire des Monuments Historiques, elle devient une figure emblématique de la ville et propose une cuisine de passion et de terroir.

    


En passant par la large porte arrondie, je suis immédiatement frappée par l’ambiance médiévale et la couleur des lieux. La salle du rez-de-chaussée un peu voutée comme un caveau abrite l’une des premières fresques réalisées par Léo Schnug. Artiste alsacien méconnu, il a pourtant travaillé au Château du Haut-Koeningsbourg et à La Cloche d’or d’Obernai. Il peint les murs de Kammerzell en 1904 et 1905. Ses œuvres que je retrouve au premier étage nous raconte des contes de fées tels que La nef des fous, Les joueurs de dés ou encore Le supplice de Tantale, conférant au lieu un passé romantique et symboliste. Il peint dans des tons ocre, gris, brun ou bordeaux. Bien qu’un peu sombre, son œuvre donne au restaurant une vision truculente de la fête et des plaisirs. Je m’installe à la table 108 – au 105, s’assoient les stars qui viennent des quatre coins du monde ! – et je regarde autour de moi. Pour laisser entrer la lumière, vingt-cinq fenêtres dites en cul de bouteille donnent l’illusion d’une maison de verre et de bois. Quel décor !

 


Préserver l’âme de la Kamm’

Depuis le début, le cœur de grands Chefs a battu avec celui de cette maison comme Paul Schloesser et Guy-Pierre Baumann. Être cuisinier dans un restaurant qui appartient autant au patrimoine qu’aux strasbourgeois, et aux autres, demande du talent, de l’énergie, de l’inventivité et du respect. Ce sont toutes ces valeurs qu’incarne le Chef Hubert Lépine depuis plus de vingt ans. Né à Moorea, élevé en Creuse, l’homme fait des stages en Sologne, dans le Périgord Noir, à Saint-Tropez, au Luxembourg, au Fouquet’s, puis en Alsace chez Haerberlin et Jung. Formé aux côtés de Baumann à partir de 1999, il continue d’écrire ce qui fait l’identité culinaire de Kammerzell.

    

Je ne crois pas exagérer si j’écris que Kammerzell est le « Royaume de la Choucroute ». En traversant l’Alsace, vous aurez certainement admirer les champs de choux et le village de Krautergersheim dont les habitants s’appellent les chouvilloises et les chouvillois. La choucroute obtient ses lettres de noblesse à Kammerzell en 1970 lorsque Baumann crée La Choucroute aux Trois Poissons, flétan, saumon et haddock. Bien que tenue secrète, j’en apprends un peu sur cette recette où les choux ont infusés avec une vingtaine d’herbes (cumin, coriandre, genièvre, …) et dans de la graisse de canard. Le résultat est à la hauteur de mes papilles ! En dessert, je recommande le millefeuille vanille et sa glace faite maison.

    


Baptisée salle cathédrale, la pièce où je me trouve n’a pas usurpé son superlatif. A travers la fenêtre entrouverte par cette belle soirée d’été, je devine la Cathédrale Notre Dame et sa pierre en grès rose des Vosges. Sous le soleil couchant, j’admire non seulement sa taille et sa flèche, mais aussi son architecture. De style roman et gothique, elle est construite entre les XIIIème et XIVème siècles. Vers 21 heures, la lumière joue sur le portail central, le beffroi et les statues. Un peu plus loin, je distingue les bâtiments de l’Oeuvre Notre Dame ainsi que les façades de la rue du Maroquin. Je comprends que Kammerzell soit indissociable de la Cathédrale.

    

Les grands de ce monde chez Kammerzell

L’escalier à vis qui m’a conduite au premier étage présente des centaines de photographies de people qui ont défilé dans cette maison : Stars du cinéma, chanteurs et musiciens, sportifs, écrivains, humoristes, dessinateurs, stars de la télévision, têtes couronnées, chefs d’État, hommes politiques, … Les signatures dans le livre d’or en attestent également : Jacques Chirac, Elisabeth Taylor, Kofi Annan, Henri Salvador, Patrick Bruel, Sylvie Vartan, Johnny Hallyday, Sophie Marceau, Edmonde Charles-Roux, …

Kammerzell n’est pas qu’un symbole, c’est un repère, un joyau, une table pour toutes les gourmandes et tous les gourmands qui ont envie de vivre un moment exceptionnel !

www.maison-kammerzell.com