Située à 1h30 de Paris par le TGV, au cœur de l’espace transfrontalier européen, Nancy est en train de devenir la métropole culturelle du Grand Est. Choisir d’y passer un week-end, c’est se plonger dans l’histoire d’une ville dont le centre historique et la célèbre Place Stanislas sont classés par l’Unesco. C’est aussi admirer les beaux exemples d’hôtels particuliers et d’immeubles Art Nouveau plus connu sous le nom d’Ecole de Nancy. Le Grand Hôtel de la Reine est le point de départ de notre balade, mais aussi de l’Histoire où vont se croiser Stanislas, Marie-Antoinette, Charles Le Téméraire, Louis XV, Emile Gallé, Jean Lamour,… Suivons Hélène Feltin.

 

Tout commence dans l’ombre de Charlemagne

A la mort de Charlemagne en 814, ses petits-fils se partagent ses terres en trois royaumes. Le royaume du centre revient à Lothaire et prend le nom de Lotharingie qui, par déformation, deviendra Lorraine au XIème siècle. Gérard d’Alsace ou Gérard de Lorraine règne sur ce territoire et fonde une cité fortifiée Nancy. Deux hommes vont changer le cours de l’histoire de la ville au XVème siècle : René II, duc de Lorraine et Charles de Valois – Bourgogne. Tous deux ont un ennemi commun : Le Roi de France Louis XI. Tous deux sont ambitieux surtout Charles (Le Téméraire) qui veut réunir son territoire, coupé en deux par La Lorraine. La Bataille de Nancy en 1477 met un point final à leur guerre avec la mort de Charles. « Qui s’y frotte, s’y pique » et la célèbre Croix de Lorraine deviennent les emblèmes du Duché de Lorraine. Au cours des siècles suivants, René II, Charles III puis Léopold entreprennent un vaste programme de constructions : Palais Ducal, Basilique, Primatiale, Château de Lunéville,…qui vont changer le visage de la ville. Après un curieux ballet diplomatique et un jeu des trônes afin d’éviter que La Lorraine ne tombe dans le giron des Habsbourg, Stanislas Lecszynski, roi déchu de Pologne, devient le beau-père du roi Louis XV. La transaction permet la paix en Europe, mais à la mort de Stanislas, la France doit récupérer la Lorraine. D’abord accueilli froidement, l’homme devient pourtant Stanislas Le Bienfaisant, homme des Lumières, et qui donne à Nancy des réalisations architecturales telles la Place Stanislas érigée pour honorer le Roi Louis XV.
 
Place Stanislas, une perspective unique au monde
Lorsque je me retrouve au centre de la Place Stanislas, j’éprouve comme un vertige tant la présence de Beautés au m2 est impressionnante ! Considérée comme la plus belle place royale d'Europe, joyau de l'ensemble architectural du XVIIIème siècle inscrit au Patrimoine Mondial de l'Humanité par l'Unesco, la Place Stanislas est un parfait exemple du classicisme français. Edifiée par Emmanuel Héré de 1751 à 1755, elle est entourée de grilles finement ouvragées et réhaussées d'or réalisées par le ferronnier Jean Lamour. Des fontaines majestueuses représentant de manière symétrique Neptune et Amphitrite sont dessinées par Barthélémy Guibal. L'Hôtel de Ville, l'Opéra-Théâtre et le musée des Beaux-Arts occupent une partie de la Place.
 

Une ville, une place, un hôtel

Construit en même temps que la Place Stanislas, cet hôtel particulier a appartenu à la famille Alliot qui a été au service des Ducs de Lorraine puis de Stanislas. Tour à tour école de chant, agence d’assurance, cercle de négociants, il devient le Grand Hôtel de la Reine à la fin du XIXème. Propriété de la ville de Nancy, l’hôtel subit en 1908 de grands travaux de restauration et de modernisation pour lui permettre d’accueillir les prestigieux visiteurs de l’exposition internationale de l’année suivante.
Mais, à quelle reine fait-on référence ? A Marie-Antoinette bien sûr. En 1770, en chemin pour rejoindre son fiancé Louis XVI, elle fait une halte à Nancy et est reçue dans un des salons de l’hôtel pour écouter des poèmes du lorrain Nicolas Gilbert. En 1810, c’est une future impératrice, cette fois, qui s’y arrête : Marie-Louise, future épouse de Napoléon, séjourne dans les mêmes appartements que Marie-Antoinette. Puis, c’est au tour de l’Impératrice Eugénie de descendre au Grand Hôtel. Citons encore le Tsar Alexandre 1er, l’Empereur d’Autriche François II, le Prince et la Princesse de Siam, par exemple. Depuis 2015, le groupe Ferré Hôtels gère l’hôtel et envisage un très vaste programme de rénovations et de transformation qui vise à faire du Grand Hôtel de La Reine le premier 5* de Lorraine.

   

En arrivant, je suis frappée par la majesté de la façade harmonieuse bordée par les grilles de Jean Lamour. Hôtel au charme un peu désuet, il abrite un magnifique décor classique de style Louis XV, des influences Belle Epoque, des moulures, un grand escalier d’honneur et plusieurs salons (Jean Lamour et Roy) classés au Patrimoine Mondial de l’Unesco.
Ses 51 chambres et Suites Royales vous accueillent dans une atmosphère romantique et chaleureuse. Depuis ma chambre royale, la vue sur la Place Stanislas est à couper le souffle : C’est un 360° sur les façades de Héré, la statue de Stanislas, les grilles dorées et les collines de Nancy. Jusqu’au coucher du soleil, je ne me lasse pas d’admirer ce décor royal, l’un des plus grands chefs d’œuvre mondiaux de l’art rococo, en plein cœur de la ville.

 

 

Au petit matin, mon plaisir est toujours aussi vibrant lorsque je rejoins les salons Jean Lamour et Roy où est servi le petit-déjeuner. Si l’Histoire vous attire, c’est l’endroit où il faut être pour commencer votre visite de Nancy. Mais, remontons plutôt le temps,… 

 

Visite guidée du centre historique

Avant de parcourir la ville à pied, je vous recommande de découvrir VISITNANCY360°, un extraordinaire outil virtuel qui propose vingt-cinq vues de sites touristiques. Quant à moi, j’ai la chance en ce samedi matin ensoleillé de retrouver Vincent Dubois, à l’office de tourisme de Destination Nancy. Comme toujours, je recommande de passer par l’office pour retirer précieux conseils et plan de ville. Nous y rencontrons Annick Thiaville qui est en charge de la valorisation des métiers d’art. Après avoir traversé la Place Stanislas, je passe sous l’Arc de Triomphe qui glorifie le roi de France Louis XV dans un médaillon au sommet de l'édifice. Puis, nous nous dirigeons vers la Place Carrière. Troisième site de l'ensemble architectural Unesco du XVIIIème siècle, cette place créée au XVIème siècle, puis remodelée au XVIIIème, fut à l'origine un lieu de joutes et de tournois, d'où son nom de « Carrière ». Face à moi, encadré par un hémicycle et orné de divinités antiques, se dresse le Palais du Gouvernement, qui hébergeait sous Stanislas l'intendant, représentant du roi de France. Aujourd'hui, il est entré dans le périmètre du Palais des ducs de Lorraine. qui abrite le musée lorrain qui réouvira en 2027. Ne manquez pas dans la Grand Rue, la remarquable porterie, inspirée de celle du château royal de Blois, qui mêle de façon élégante l'art gothique et la Renaissance italienne.No
ta Bene
 : au numéro 8 de la Place Carrière, se cache un endroit insolite à voir absolument. Dans cette Rue des Ecuries, de nombreuses passerelles enjambent les pavés pour relier des appartements à des jardins jouxtant le parc de la Pépinière. Charmant et magique ! 

 

Un peu plus loin, je découvre la Porte de la Craffe, le plus ancien monument du centre historique de Nancy et seul vestige des fortifications médiévales. Elle fut édifiée aux XIVème et XVème siècles et ses tours ont servi de prison jusqu'au XIXème. Prenez le temps de passer sous sa voûte de brique et de pierre : Restaurée en 2013, elle est tout à fait remarquable. Enfin, je termine ma promenade dans la vieille ville avec l’Eglise des Cordeliers qui doit son nom à l'ordre des Franciscains et fut édifiée à la fin du XVème siècle par René II, au lendemain de la bataille de Nancy. Saint Denis des Ducs de Lorraine, elle conserve des tombeaux remarquables ainsi qu’une chapelle octogone inspirée de celle des Médicis de Florence.

 

Naissance de l’Ecole de Nancy

A la fin de la guerre franco-allemande de 1870-1871, de nombreux optants - français refusant l’annexion, en provenance des régions devenues allemandes - arrivent à Nancy : c’est une population d’artistes, d’industriels, d’investisseurs et de mécènes qui se mêle à leurs homologues nancéiens. Gallé, Majorelle, Prouvé, les frères Daum, Gruber, André, Weissenburger,…fondent ainsi en 1901 « L’Alliance provinciale des industries d’art » plus connue sous le nom d’Ecole de Nancy. Ces artistes créatifs, originaux et polyvalents trouvent leur inspiration dans les formes végétales (ginkgo, ombelle, nénuplar, chardon, ...) et animales, comme les libellules. En utilisant la verrerie, la ferronerie, l'acier, le bois, ils veulent mettre le beau dans les mains de tous et faire entrer l'art dans les foyers.

 

L’Art Nouveau à la Brasserie L’Excelsior

Classée aux Monuments Historiques depuis 1976, cette Brasserie est le cadre idéal pour déjeuner et pour aborder le style Art Nouveau. Dans la grande tradition des cafés de la Belle Epoque, L’Excelsior est inaugurée en 1910 et devient rapidement un lieu où tous se pressent. Cet ensemble décoratif unique est le fruit de la collaboration de Louis Majorelle, Jacques Gruber et Antonin Daum, véritables hérauts de l'École de Nancy. Les vitraux de Gruber ornés de larges fougères, pins et feuilles ginkgo répondent à une mosaïque de larges palmes. Le mobilier en acajou massif de Cuba conçu par Majorelle associe ses couleurs chaudes à l'essence exotique des lambris en tamarinier. Trois cents becs lumineux de Daum, des lustres et des appliques en cuivre ciselé éclairent les plafonds. L’Excelsior est le reflet d’une brasserie traditionnelle qui propose aussi bien de délicieuses quiches Lorraine, des ris de veau ou des plateaux de fruits de mer.

 

Villa Majorelle, première maison Art Nouveau de Nancy

Après d’importants travaux de rénovation et la réhabilitation d’une partie des espaces intérieurs, la Villa Majorelle invite à nouveau à un voyage dans le temps et dans l’intimité d’une maison de famille. Construite en 1901-1902, par l’architecte Henri Sauvage pour l’ébéniste Louis Majorelle, elle incarne l’Art Nouveau nancéien. Elle est pensée pour accueillir une famille - Louis, sa femme et leur fils unique Raymond -, et doit offrir un confort quotidien. A l’arrivée, on est frappé par la fluidité des formes et des motifs décoratifs et le jeu continu de l’articulation entre extérieur et intérieur. Devant la Villa, je remarque que le détail est partout : Sur les cheminées, les tuyaux de descente, dans les auvents, les balcons saillants, les grès émaillés, les fers forgés, tout est à sa place, tout a sa place.

 

Dans la maison, les pièces aux dimensions raisonnables ont été décorées par des artistes et amis : le céramiste Alexandre Bigot et le peintre Francis Jourdain réalisent respectivement les grès flammés extérieurs et intérieurs et les peintures décoratives de la salle à manger. Louis Majorelle conçoit sans surprise le mobilier. Il revient au maître-verrier nancéien Jacques Gruber le soin de concevoir les vitraux des pièces principales. Passée la porte d’entrée, je suis bouleversée par le spectaculaire décor de monnaie-du-pape et le magnifique miroir - porte-parapluies - porte-manteaux. Dans la grande cage d’escalier, mon œil est attiré par la rampe dessinée par Henri Sauvage et exécutée par Louis Majorelle qui reprend un lierre dont le feuillage diminue au fur et à mesure que l’on s’élève. Dans la salle à manger, se trouve au centre une imposante cheminée en grès flammé, dessinée par Alexandre Bigot, tandis que tout autour de la pièce court une frise de panneaux peints par Francis Jourdain où se déploie un joyeux cortège d’animaux de ferme. Au premier étage, la chambre à coucher renferme un mobilier d’exception, composé d’un lit, d’une armoire, de deux commodes et d’une table de chevet. Exécuté en frêne, avec un placage de la même essence et des incrustations de nacre et de laiton, le mobilier est réalisé dans un bois clair, assez rare dans la production de l’ébéniste. Au second étage, nous pourrons découvrir prochainement l’atelier de Louis Majorelle éclairé par de grandes baies vitrées. Enfin, le jardin et la terrasse avec sa spectaculaire balustrade en grès parachèvent cette visite où l’Art Nouveau a atteint son expression la plus aboutie et la plus poétique.

 

Eclectisme au Musée des Beaux-Arts

Sur la Place Stanislas, dans un pavillon XVIIIème que rappellent le péristyle et l’escalier d’honneur, le musée est l’un des phares de la vie culturelle nancéienne. Ici, on peut voir des collections de l’art européen avec Caravage, Rubens, Delacroix; des peintures françaises du XVIIIème avec Boucher, De Troy ou encore Vouet; des œuvres de Delacroix (La Bataille de Nancy), Gustave Doré, Emile Friant (merveilleux !), Manet, Dufy, Picasso, Modigliani, Lurçat, … Le musée consacre également un grand espace au constructeur Jean Prouvé, largement marqué par les artistes de l’Ecole de Nancy. Parmi les expositions du moment, citons l’impressionnante oeuvre « Feast of Fools » de Mad Meg qui critique et analyse le monde par ses dessins à la plume et à l’encre de Chine. Et à partir du 18 septembre, le musée mettra à l’honneur « Les Adam, la sculpture en héritage ». Originaire de Nancy, ce sont trois générations de Adam qui représentent la plus grande dynastie de sculpteurs français du XVIIIème siècle.

 



Au niveau -1, m’attend une immense surprise ! Installée au milieu des anciennes fortifications de Nancy, la collection DAUM rassemble plus de neuf cents pièces de verre datant des débuts de la manufacture en 1878 jusqu’à aujourd’hui. Jean DAUM, puis ses fils Auguste et Antonin sont à l’origine des pièces qui nous font encore rêver en 2021. Associé à des artistes de génie tels Dali ou McConnico, DAUM produit des objets culte du design. Cette saison, par exemple, c’est la mer de corail qui est l’honneur avec des vases, des coupes ou des animaux extraordinaires.

 

Les bonnes tables de la Place Stanislas

Quoi de mieux que s’installer sur les terrasses de cette magnifique place pour un déjeuner ou un dîner ? Et en plus, pour ce dernier week-end de mai, le soleil brille sur les grilles d’or de Jean Lamour. A côté de la fontaine de Neptune, la Brasserie Jean Lamour propose une carte gourmande où plats classiques riment avec spécialités locales comme la tarte aux mirabelles.



De l’autre côté de la place, face à la statue de Stanislas, le Grand Café Foy, ouvert en 1850, tient son nom du Général d’Empire, Maximilien-Sébastien Foy qui a brillamment combattu sous les ordres de Napoléon. Depuis sa terrasse, nous admirons le balcon de l’Hôtel de Ville où se marier relève du conte de fées. La carte de cette Brasserie est réputée et les tables se réservent à l’avance. Je vous recommande un pavé de thon sur le grill, une tarte aux fraises et ses éclats de pistaches avec un délicieux Côtes de Toul (avec modération).

 

Balade autour du Parc de Saurupt

Parmi les riches brochures éditées par Destination Nancy, je vous recommande les itinéraires Art Nouveau et en particulier celui qui conduit au Parc de Saurupt. A une dizaine de minutes du centre-ville, nous découvrons six villas exceptionnelles dans un bel écrin de verdure. Imaginées par les architectes Emile André et Henry Guitton, ces maisons privées bâties entre 1920 et 1930 sont toutes différentes et portent de jolis prénoms : Villa des Glycines, Villa Lang, Villa des Roches ou encore Villa Marguerite.

Ainsi se termine notre week-end à Nancy, une ville d’Histoire avec de nombreux cadres artistiques exceptionnels, une ville qui se renouvelle et qui continue de nous étonner. A vos agendas !

www.destination-nancy.com
www.visitnancy360.com
www.hoteldelareine.com
www.musee-ecole-de-nancy.nancy.fr
www.musee-des-beaux-arts.nancy.fr
www.brasserie-excelsior-nancy.fr
www.grandcafefoy.com