Accolé à l'ombre de la galerie, la Piazza della Signoria ouvre une apostrophe aux rayons du soleil et offre au public un aperçu de l’esprit florentin : divin mélange entre l'effervescence de commerçants et le silence des monuments qui l'observent. Nul n'est capable d'ignorer à son épicentre, le Palazzo Vecchio et sa rustique façade de pierre impénétrable, siège du pouvoir de la république florentine qui connut autant d'épisodes de déclin que de rayonnement. À son pied, le mythique David de Michel-Ange se prépare à son combat (la statue présente sur la place, est une copie, l'originale étant conservée à la Galleria dell'Accademia ), sur son flanc la Loggia dei Lanzi accueille sous ses voûtes quelques-uns des plus beaux chefs-d'œuvres de sculpture de la collection des Offices. Méditation devant l'Enlèvement des Sabines modelé par Giambologna (ou Jean de Bologne) en 1582, entre les mains puissantes des romains, la douceur laiteuse des Sabines, poussant un cri étouffé résonnant silencieusement sur les façades de la place...
Loggia dei lanzi, Enlèvement des Sabines, Giambologna - Palazzo Vecchio ©Aurélie M.Caillard
Non loin de ce haut lieu républicain, la Piazza del Duomo figure parmi les plus anciennes de la cité florentine. Celle-là même qui accueille en son sein une trilogie de monuments d'une beauté triomphante, aux couleurs des mêmes marbres : blanc de Carrare, vert de Prato, rose de Marenne et rouge de Sienne. Le plus ancien de cette famille de pierres aurait baptisé tous les florentins du IVème au XIXème siècle. Derrière les portes du baptistère Saint Jean-Baptiste, dont les plus célèbres furent modelées pendant plus de 25 ans par Ghiberti, repose une voûte couverte d'un majestueux Christ et ses apôtres, mosaïque aux reflets dorés aveuglants de style byzantin. L'octogone de marbre polychrome, bâti sur une ancienne maison romaine, se place devant la façade souveraine de la Cathédrale Santa Maria del Fiore (baptisée ainsi en rapport au lys de Florence). Les colonnes et ogives finement sculptées et l'harmonieuse composition des différents marbres, symboles d'un style gothique flamboyant maîtrisé à la perfection, ouvre à la découverte d'un édifice immense, dont aucun centimètre n'aura été négligé. À son sommet, le dôme de Brunelleschi porte son ombre sur la cité.
« Quel homme, si dur ou si jaloux, ne louerait l’architecte Filippo en voyant cette énorme construction se dressant jusqu’au ciel, assez vaste pour couvrir de son ombre et la population de Toscane, et exécutée sans l’aide de poutrages ni de renfort de supports de bois. »
Léon Battista Alberti, De Pictura (1435)
En grimpant au sommet du Campanile de Giotto accolé à Sainte Marie des fleurs, la prouesse technique alliée à la grâce architecturale s'offre au regard, un ballet de tuiles rouges perçant le bleu du ciel... L’on ne peut que rester le souffle coupé devant le chef-d'œuvre bâti par Brunelleschi en 1436, pendant plus de seize années. Ce dôme, dont le diamètre de 43,5 mètres en fait le plus grand au monde, ne reposant que sur lui-même : ses 37000 tonnes et quatre millions de briques. Sous la coupole de cet ouvrage que l'on croyait impossible à réaliser à l'époque où il fut pensé, 3600 mètres carrés de fresques peintes par Giorgio Vasari et Federico Zuccaro, contemplent les fidèles mortels. Après une première volée de marches, à plus de 30 mètres de haut, nous nous retrouvons aux pieds de démons sanglants à la recherche de damnés, de près de deux mètres de hauts. Après l'ascension de 463 marches, Brunelleschi, ouvre la lanterne du dôme, offrant une vue panoramique sur Florence et ses alentours, à 91 mètres du sol, l'homme se rapproche du divin...
Brunelleschi s'éteint subitement quelques années après la fin des travaux, lors de ses obsèques, l'artiste recouvert d'un tissu de lin blanc, admire le chef-d'œuvre de sa vie, avant d'être inhumé dans la crypte de la cathédrale, où l'on appose une plaque commémorative sur laquelle l’artiste est qualifié dôté d’une "intelligence divine".
Florence se pare des plus beaux bijoux qu’une cité italienne pourrait porter à son cou. Autant de surprises patrimoniales qui s’admirent d’en haut. Sur la colline au sud-est du coeur de ville se cache la petite basilique San Miniato al Monte, sa façade de marbre immaculé de carrare éblouissant au soleil. À l’intérieur, la nef de l’édifice se borde de colonnes provenant d’édifices romains, supportant une charpente en bois polychrome particulièrement raffiné. Au fond du choeur, une mosaïque sur fond d’or du XIIème siècle rassemble le Christ, la Vierge et Saint Miniatus. Cette surprenante petite basilique, au délicat pavement inspiré du zodiaque et ses fresques de haute-époque, dédie son culte à Saint Miniatus, premier martyr de la ville, où il repose depuis de longs siècles. Quelle meilleure demeure pour le premier saint de Florence ? Aux pieds de la basilique, une vue imprenable sur la cité se déroule sous nos yeux, dominée par le dôme de Brunelleschi, c’est un panorama de dômes et de flèches perçant le ciel de Toscane. Les flots tranquilles de l’Arno, traversant les ponts et bordant les façades allant de l’ocre à la terre de Sienne… Combien de trésors nous cache encore Florence…
Aurélie M.Caillard