La 24ème édition du Festival Cinémania célèbre le regard de la jeunesse, et le premier long métrage de Nathan Ambrosioni, « Les drapeaux de papier » relève le défi avec brio. Son sujet, la réinsertion d’un ancien détenu carcéral aborde les imperfections de l’homme qui en font toute sa beauté : sa rage, son désir de liberté et sa violence. Vincent (Guillaume Gouix) et Charlie (Noémie Morlant) se retrouvent dans cette tempête émotionnelle, une danse fraternelle forte à couper le souffle.

 



Les drapeaux de papier, de Nathan Ambrosioni

Après ces premières projections à Montréal quelles sont vos impressions ?

Je suis très content d’avoir montré mon travail pour la première fois au Québec. Le festival Cinémania donne une excellente visibilité au cinéma francophone et le représente avec brio. Je ressens en tout cas un grand intérêt du public québécois pour la création francophone, les gens de déplacent en salle pour des longs métrages indépendants, ce qui est vraiment inspirant.

 

Justement, ce public québécois vous reçoit vous, jeune réalisateur de 19 ans, comme le Xavier Dolan version française. Que ressentez-vous face à ce clin d’œil ?

Je suis très touché de cet accent car Xavier Dolan est un grand artiste de notre époque, il fait à mon sens du cinéma particulièrement humain, ce qui est aussi mon ambition. Naturellement, je suis encore loin de son talent et nos regards sont différents. Dolan m’a donné cet espoir de réaliser du cinéma peu importe son âge et pour cela, je lui suis particulièrement reconnaissant.

 

 

Dans les drapeaux de papiers, vous traitez du sujet difficile du milieu carcéral avec un regard juste, comment arriver à une telle maturité sur un premier long-métrage ?

La clef c’est le travail et l’acharnement, il n’y a pas de secret. J’ai commencé à faire mon cinéma à l’âge de douze ans, je tournais des films avec des amis et les moyens du bord, après l’école. J’essayais de faire des films sans cesse, je n’ai pas passé un soir depuis cet âge là, sans faire des montages dans ma chambre, ce qui représente énormément de travail. J’ai commencé à penser aux Drapeaux de papiers depuis début 2017, j’y ai accordé énormément de temps et d’énergie et puis, une fois bouclé, j’ai envoyé le scénario par email et par chance je suis tombé sur un regard qui l’a adopté.

Pour le penser, j’ai énormément lu sur détenus en libération sèche, c’est à dire ceux qui reprennent leur vie sans soutien. Il y a beaucoup d’eux dans les phrases et l’attitude de Vincent (premier rôle du long-métrage). Concernant le cadre et l’environnement de cette histoire, j’ai filmé ce que je connaissais : le film a été tourné dans ma région natale, la maison où beaucoup de scènes ont été tournées se trouve juste à côté de celle de mes grands-parents, le supermarché où travaille Charlie est celui où je faisais mes courses… Ces gens-là, je les ai observé pendant des années, je ne pouvais qu’écrire sur eux !



Le sujet principal de ce long-métrage c’est aussi et surtout la relation entre un frère et une sœur, ses tensions, ses non-dits, cette dévotion mutuelle et dévorante. Quelle part de votre propre histoire avez-vous insufflé dans ce scénario ?

J’ai la chance d’avoir une famille très unie, et ma sœur naturellement m’a beaucoup inspiré pour les Drapeaux de papier. Je suis très proche d’elle et je connais ce rapport fraternel qui fait que dans chaque phrase, il y a une intention, qu’elle soit bonne ou mauvaise. Entre un frère et une sœur, il n’y a jamais de phrases banales, derrière chaque mot se blottit une profonde affection, une intention forte. Quelque part, je voulais retrouver ma sœur dans ce film, et elle est aussi courageuse que Charlie.

 

Comment avez-vous pensé la distribution de ces rôles complexes et touchants ?

J’ai écris les rôles pour Noémie Morlant et Guillaume Gouix (tous deux récemment nommés aux Césars), et pour moi c’était eux ou personne, je ne pouvais imaginer d’autres acteurs endosser ces rôles, et ils ont été incroyables. Leur enthousiasme à la proposition du projet m’a fait croire en moi, c’est extrêmement galvanisant lorsque des acteurs que l’on a envie de filmer, l’acceptent avec plaisir et curiosité.

 

Comment choisir une composition musicale qui évolue avec l’image et la transporte vers le discours ?

Mon choix musical pour ce premier long-métrage s’est vraiment fait selon mes goûts personnels. Cette musique c’est celle que j’écoute dans la vie de tous les jours, c’est celle qui m’a accompagné dans l’écriture du scénario et j’ai eu la chance de trouver un compositeur qui a très vite intégré mon esprit et qui a fait un vrai travail d’accompagnement sur l’image en créant des compositions qui ont réussit à capter ces moments de pure liberté que je voulais retranscrire à l’écran. Le film sort en février 2019 en France, j’ai hâte de recevoir l’avis du public français, je fais confiance en son regard sur la création indépendante.